[:fr]La parole est aux speakers : Aleth Gueguen (AFUP Day 2019 Rennes)[:]
[:fr]Jusqu’à l’AFUP Day 2019 Rennes, retrouvez nos interviews de speakers pour mieux comprendre leur parcours et le sujet qu’ils ou elles aborderont lors de leur conférence !
La conférence
Un-e professionel-le du numérique doit-il-elle avoir une éthique ?Quand on écrit du code, est-ce qu'on a toujours conscience que cela peut avoir un impact sur la vie des gens ? Est-ce qu'on s'assure toujours de ne pas faire de mal (même si on veut sauver le monde) ? Un algorithme dit-il toujours la vérité ou est-ce que c'est seulement l'expression de notre opinion ? Je pense qu'il est important qu'on commence à se poser ces questions. Dans ce talk, je vous montrerai des exemples et des outils –comme le “Privacy" by Design Framework– pour nous aider à identifier les situations à risque et y répondre. |
La Fabrique 17/05/2019 16:20-17:00 |
Dans certains pays (par exemple au Québec), il existe un code d’éthique pour les ingénieurs. Est-ce que ça te semble un exemple à suivre ?
Il y a effectivement au Québec une charte, liée à l’Ordre des Ingénieurs du Québec. Il est obligatoire de faire partie de cet ordre pour pouvoir exercer… Sauf pour les ingénieurs en informatique.
Pour remettre les choses en contexte, le corps des ingénieurs a été créé à l’origine pour construire des ponts, des barrages, des centrales nucléaires, des avions de guerre… toutes constructions complexes qui demandent une infrastructure énorme et sont faites dans des cadres très réglementés. Ainsi, l’éthique existe plus ou moins à travers la réglementation.
En France, on n’a pas cette notion du Corps des Ingénieurs qui devrait respecter une éthique, comme l’Ordre des médecins ou celui des avocats. C’est assez lié à l’Histoire, le corps des ingénieurs ayant été créé notamment pour être le bras « armé » du gouvernement (sans que cela les empêche de construire des ponts et des barrages, bien sûr).
De toute façon, on se rend bien compte que les constructions complexes ne peuvent pas se faire seul. Ce travail en équipe, ainsi que les besoins d’infrastructure évoqués précédemment, posent une « barrière » de protection éthique à l’entrée. Cette barrière n’existe pas dans l’informatique : pour écrire du software, il n’y a besoin que d’un PC (et à la limite d’une table et une chaise). Aujourd’hui, on se rend compte que le software peut avoir une influence terrible sur la vie des gens, avec Facebook par exemple.
Donc : est-ce qu’il faudrait instaurer un code d’éthique ? En France, le réflexe est souvent qu’il faut légiférer.
Bien qu’il ne soit plus possible aujourd’hui de créer un ordre (comme l’ordre des médecins ou des avocats), on commence tous à prendre conscience qu’il faut une éthique. Mais faut-il que ce soit réglementé ? C’est une autre question.
L’exemple du Québec n’est donc pas applicable à la France, et ce n’est pas forcément un exemple à suivre.
L’éthique dans le numérique est-elle enseignée de nos jours à l’école ? Si non, penses-tu qu’il faille aller dans ce sens ?
Ayant terminé l’école il y a longtemps, je vais avoir un peu de mal à répondre à la question. La seule expérience récente que j’ai, ce sont les cours que je donne à Polytech Nantes. D’après mes discussions avec des élèves, ce n’est pas une matière qui semble être enseignée, et il faudrait probablement aller dans ce sens. En discutant à droite et à gauche – notamment dans le cadre de mon activité où j’accompagne des entreprises dans les démarches RGPD – je me rends compte que finalement, les développeurs sont assez peu conscients des enjeux éthiques : la prise de conscience est récente. Ils sont demandeurs d’aide, de contenu et de références pour les aider à réfléchir et il serait probablement intéressant d’aider les jeunes développeurs qui sont en train d’apprendre leur métier, de leur fournir des bases pour avoir une réflexion saine sur ce sujet.
Penses-tu que le RGPD a donné lieu à une réflexion sur l’éthique de la part des développeurs et développeuses ?
La réponse courte : je n’en ai pas vraiment l’impression.
La réponse plus circonstanciée : comme je le disais dans la question précédente, en accompagnant les entreprises et en discutant avec les développeurs et les développeuses, je me rends compte que certains commencent à se poser des questions, qu’ils ne savent pas par où commencer, qu’ils voient bien autour d’eux toutes les problématiques que pose le software en règle générale, tout l’impact que ça peut avoir sur la vie des gens.
Effectivement, le RGPD a été une porte d’entrée pour montrer que oui, il faut se poser des questions, qu’on ne peut pas écrire du code sans se soucier de ce qui se passera ensuite, en se disant que ce qu’on fait est bien suffisant et qu’il y aura d’autres personnes pour réfléchir aux problématiques éthiques : ce n’est pas vrai.
Avant même de commencer à poser ses mains sur son clavier, et de la même façon qu’on planifie ou qu’on réfléchit au modèle de données, il faut réfléchir aux menaces qu’on fait peser sur la vie des gens, que ce soit le respect de la vie privée (dans le sens RGPD) ou d’autres risques qu’on est en train de mettre en place sans vraiment s’en rendre compte.
J’espère que ces quelques réponses vous permettront de vous faire votre propre idée.
Une conférence présentée par
Aleth GUEGUEN |
Aleth développe des outils numériques pour les PME depuis plus de 10 ans. Elle travaille avec des entreprises de l'industrie et des services qui veulent rationaliser et automatiser leur process. Elle aide les décideurs à prendre des décisions éclairées sur leur stratégie numérique. Pour elle, le software est au service des gens pour leur éviter les tâches sans intérêt. Depuis 2016 elle conseille et assiste les entreprises du numériques qui veulent s'aligner avec le RGPD. Dès qu'elle peut, elle rejoint son bateau dans la baie de Quiberon. |
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