[:fr]Jusqu’au Forum PHP 2018, retrouvez nos interviews de speakers pour mieux comprendre leur parcours et le sujet qu’ils aborderont lors de leur conférence !
La conférence
En tant qu’agiliste évangéliste, quels sont selon vous les plus grands risques lors de la mise en place de méthodes agiles dans une équipe ?
L’agilité n’est pas tant méthodologique que culturelle. Le rapport à l’incertitude et à l’avenir, qui est une notion importante de l’agilité, ne se définit pas dans une méthode. Mais il est bien culturel : chaque équipe, en fonction des personnes qui la composent, en a une perception différente. Il en va de même pour la notion de collaboration. Pour certaines équipes, il est normal de s’entraider en interne mais aussi à l’extérieur du groupe. A contrario, pour d’autres, le chacun pour soi et le conflit priment, et sont d’ailleurs souvent désignés par de jolis euphémismes tels qu’engagement ou responsabilité.
Donc les personnes sont primordiales. Il est délicat de travailler en confiance avec une personne d’une méfiance extrême. Une personne craintive a besoin de garanties constantes quant à l’avenir avant de réaliser la moindre action, ce qui est difficilement compatible avec la philosophie agile. L’agilité est intuitu personae. Le premier principe du manifeste agile nous le rappelle avec force : « Les individus et leurs interactions plus que les processus et les outils. ». Nous pourrions le reformuler de la sorte : les personnes sont plus importantes que les méthodes. D’ailleurs ce sont bien les personnes qui font les méthodes et non les méthodes qui font les personnes.
D’où un quiproquo régulier sur le fait de vouloir mettre en place des méthodes agiles dans des environnements qui culturellement ne le sont pas, voire sont en opposition avec les valeurs portées par l’agilité. Cela signifie-t-il que la démarche est vaine ? Cela dépend du contexte. Si les succès s’enchaînent, si les rapports humains sont de qualité, que toutes les parties sont satisfaites, que l’équipe prend plaisir à développer le logiciel commandé, que le client reçoit régulièrement les livraisons des fonctionnalités dont il a besoin, alors pourquoi changer ?
En revanche, s’il s’agit d’une situation de crise chronique, que le client est fatigué par un logiciel qui n’évolue que peu ou pas, que les relations sont tendues, que les développeurs sont démotivés, alors peut-être qu’un changement doit être envisagé. Mais il s’agit d’un changement culturel de fond, et non simplement de la mise en place d’une méthode. Dans ce cas, créer une équipe ex-nihilo, avec une forte autonomie, sur une vision commune, avec des valeurs partagées, ça peut-être une possibilité. Les personnes qui rejoindront cette équipe le feront volontairement car elles partagent cette vision.
Une « transformation agile » qui imposerait des « recettes miracle », est un contre-sens avec l’agilité qui prône une forte autonomie des personnes et des équipes. La mise en place de méthodes agiles devrait se faire lorsqu’une équipe touche à ses limites, qu’elle pressent que l’agilité pourrait être une voie à explorer, à sa demande.
Pour répondre à la question, un des grands risques lors de la mise en place des méthodes agiles est de vouloir… mettre en place des méthodes agiles, sans considérer ni la culture de l’organisation, ni les personnes qui la composent.
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