La parole est aux speakers : François Zaninotto
Jusqu’à l’AFUP Day 2024, retrouvez nos interviews de speakers pour mieux comprendre leur parcours et le sujet qu’ils ou elles aborderont lors de leur conférence !
La conférence
Anatomie d'un projet open-source profitableUne énorme part du numérique repose sur l'open-source. Entre le/la passionné•e qui dédie ses soirées à un projet de coeur et le géant du numérique qui subventionne à fonds perdu un projet pour cultiver son image de marque, il existe une voie étroite pour faire de l'open-source sans y laisser sa santé. React-admin est un projet open-source qui est arrivé à générer assez de revenus pour rémunérer une équipe dédiée, sans levée de fonds ni pratiques marketing douteuses. Autrement dit : nous sommes payés pour faire de l'open-source. C'est un doux rêve, mais surtout le résultat d'une alchimie délicate entre opiniâtreté, qualité du code, réactivité, approche produit, documentation, support technique, animation de communauté et gestion financière. Au-delà du code, quelles sont les recettes pour passer d'un projet open-source populaire à un projet open-source profitable ? Cette conférence non-technique sera l'occasion de partager nos apprentissages. |
I.U.T. Nancy-Charlemagne 24/05/2024 17:05-17:45 |
N’est-il pas paradoxal de parler d’argent lorsqu’il s’agit de projets open-source ?
Un projet open-source publie son code, mais le label ne dit rien sur son prix. C’est pour ça qu’on fait la différence entre open-source et free software. Il serait paradoxal de parler d’argent pour un logiciel free, mais pour un logiciel open-source, à mon sens, c’est indispensable.
J’utilise des logiciels open-source depuis plus de 20 ans, et ce qui dicte le plus mon choix d’outils aujourd’hui c’est la pérennité du projet. Pour qu’un projet open-source tienne sur la durée, il faut que ses contributeurs en tirent un bénéfice. Sinon, il y a de grandes chances que le projet finisse abandonné, ou pire, transmis à un nouveau mainteneur qui se révèle être malintentionné (xz, ça vous dit quelque chose ?).
Payer quelqu’un pour son travail, ça ne me parait pas une idée si révolutionnaire que ça. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire dans l’open-source. Les sponsors, les dons, ça ne marche pas. Pour ma part, j’ai mis plus de 15 ans à trouver comment rendre un projet open-source profitable.
On entend beaucoup parler de mainteneurs de projet open source qui abandonnent faute de soutien alors que leurs projets sont utilisés par de grands groupes. Quel regard portes-tu sur cette situation ?
L’objectif d’une entreprise, c’est de gagner de l’argent. Si elle a le droit de prendre une chose gratuitement et de la vendre, il est normal du point de vue des actionnaires qu’elle le fasse. Ce n’est pas immoral, c’est amoral – il n’y a pas de morale là-dedans. Ça ne veut pas dire qu’une entreprise ne peut pas essayer d’être morale, mais dans ce cas elle a un désavantage sur ses concurrents (c’est, par exemple, le cas de mon entreprise).
Donc si une entreprise utilise un outil open-source sans payer, et que le mainteneur en souffre, pour moi le problème est du côté du mainteneur. Il aurait dû mieux protéger sa création des entreprises prédatrices. Il existe de nombreuses licences, qui techniquement ne sont pas open-source, mais plutôt « source available », qui interdisent aux grands groupes de s’accaparer la valeur créée par des devs. Pourquoi ne pas les utiliser ?
Et si un mainteneur abandonne son projet parce que d’autres personnes gagnent de l’argent sur son travail mais pas lui, ça prouve bien qu’il faut que le travail sur l’open-source soit rémunéré.
Tu as fondé il y a plus de 10 ans la société Marmelab qui a pour but de rendre le monde meilleur grâce au numérique : quelle est la dernière avancée technique qui est pour toi la plus bénéfique pour la planète ?
Je ne suis pas sûr que la solution au problème majeur de notre planète aujourd’hui, le réchauffement climatique, vienne de la technologie. On pourra peut-être produire de l’énergie verte en quantité et absorber le CO2 de l’air d’ici quelques décennies. Mais il sera trop tard. En attendant, il n’y a pas d’autre choix que la sobriété, ce qui veut dire baisser volontairement son niveau de confort.
Mais puisqu’il faut citer une avancée, j’en profite pour parler de GreenFrame, un outil de mesure des émissions de CO2 d’un site web que nous avons développé en collaboration avec le CNRS. C’est un premier pas : on ne peut réduire que ce que l’on mesure.
Une conférence présentée par
François ZANINOTTO |
Fondateur de marmelab, entrepreneur, développeur PHP & JS, lead développeur de react-admin et GreenFrame, François est également contributeur open-source prolifique, coach agile, ex core team Faker et Symfony. |