La parole est aux speakers : Louis Vareille

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Jusqu’au Forum PHP 2025, retrouvez nos interviews de speakers pour mieux comprendre leur parcours et le sujet qu’ils ou elles aborderont lors de leur conférence !

La conférence

Changer le monde. Une réunion après l’autre

Dans toutes les organisations, la réunion est la courroie de transmission de la stratégie et le creuset de la culture. Et pourtant, rares sont celles et ceux qui leur portent toute l’attention qu’elles méritent. Avec pour conséquence des dégâts sur l’efficacité collective et l’engagement individuel. Imaginons un monde où chaque réunion est conçue et pilotée pour être un moment mémorable, à la fois productif, engageant et apprenant. Un moment collectif que l’on quitte avec de la clarté sur ce que l’on a à faire et l’envie de le faire. Un moment collectif qui permet à chacun de donner toute la puissance de sa singularité. Ce n’est pas parce qu’aucune université ou école n’enseigne ce que sont les bonnes pratiques de réunion qu’elles n’existent pas. Louis, réuniologue, président de l’Ecole Internationale de Réuniologie, prendra la parole pour nous transmettre sa passion et son énergie, et nous donner envie de mettre en oeuvre des gestes simples pour tous devenir des acteurs du changement, une réunion après l’autre.

Tu as passé 10 ans aux Pays-Bas, quelles sont les principales différences culturelles que tu as notées dans le travail entre les Pays-Bas et la France ?

Je ne suis pas le mieux placé pour répondre à la réalité du travail aux Pays Bas, car je travaillais dans un siège international avec 44 nationalités de tous les continents sur le site. C’était un environnement très global.

Cependant, je peux dire que les néerlandais ont une relation moins émotionnelle que nous au travail. Ils délivrent dans le cadre d’un contrat. C’est ainsi que j’ai toujours été surpris de la réaction des néerlandais et néerlandaises lorsque je les félicitais pour leur travail. Souvent ils ou elles me rétorquaient : « c’est normal. Je fais mon travail. Le travail pour lequel je suis payé(e) ».

L’autre observation est qu’ils avaient tendance à être très tournés vers l’action. Je disais souvent « nous les français, nous jouons aux échecs et passons des semaines à discuter avant de décider, alors que vous les néerlandais vous jouez aux dames. Vous avancez vos pions. » Il y a bien entendu des explications à chercher du côté de l’empowerment : responsabilité et autonomie.

Leur relatif détachement les conduisait également à être très directs et ils n’hésitaient pas à commenter le travail des autres.

Enfin, comme ils étaient très attentifs à bien respecter leurs trois vies : professionnelle, personnelle et collective (sport et associations), ils étaient très « focus » au travail. Cela leur permettait de quitter le bureau à 17h, en ayant pris moins de 30 minutes pour déjeuner.

Dans tous les cas, si je dois parler de réunion, j’ai eu la chance d’en animer dans 45 pays. Je n’ai jamais rencontré de personnes qui aiment les réunions qui démarrent en retard, qui n’ont pas d’objectif, durant lesquelles il n’est pas possible d’exprimer son point de vue et qui se termine sans clarté sur ce qui est à faire.
Je n’ai jamais rencontré personne qui contestait l’exigence que j’apportais aux réunions dont j’avais la responsabilité.

S’il n’y a qu’une erreur à éviter pour tenir une réunion, laquelle serait-elle ?

Facile !

Ne pas avoir un objectif clair.
« Bonjour. Je vous propose de faire un point sur le projet Catapulte » n’est clairement pas un objectif. Juste un prétexte pour avoir une discussion de bistrot. Par contre : « j’ai besoin de votre accord pour investir 10 000 € de plus sur le projet Catapulte pour le terminer selon le planning. » Ça c’est un objectif.

Pas la peine de faire de dessin pour comprendre qu’un objectif clairement énoncé en début de réunion va élever l’intérêt que porteront les participants et les participantes aux discussions. Sous réserve bien entendu que le casting de la réunion ait été bien établi. Trois personnes bien choisies peuvent suffire à atteindre l’objectif, ici l’accord sur la rallonge du budget. Même si la moitié de l’organisation peut apprécier d’assister à un point sur le projet Catapulte, surtout si cela peut les rassurer d’entendre qu’ils ou elles ne sont pas les seul(e)s à déraper sur le planning de leurs projets !

En ce moment où l’on parle beaucoup d’IA. As-tu un avis sur les outils de génération de compte rendu de réunion via IA ?

Les choses bougent effectivement. C’est vrai que les outils se sont développés dans les deux dernières années et offrent des fonctionnalités vraiment intéressantes. Je parle d’IA extractive.

Commençons en rappelant que la qualité du compte rendu est directement liée à la qualité de la captation. Et ce qui fonctionne très bien dans des réunions distancielles symétriques fonctionne plutôt moins bien lorsque les réunions sont asymétriques ou 100 % présentielles. Donc la première question sera bien évidemment la qualité de la captation.

La deuxième est la qualité de la réunion elle-même : « garbage in – garbage out ». L’IA n’est pas compétente pour faire un compte rendu d’une réunion mal conduite, sans objectif clair, sans bonne discussion et sans plan d’actions clair et partagé.

Ce que je trouve intéressant est l’utilisation que l’on peut faire de la donnée a posteriori (IA extractive), en interrogeant le système par exemple : qui a le plus parlé ? Ou bien qui a été le plus créatif ? Ou bien à quel moment les émotions ont été les plus fortes ? Comment est-ce que la réunion aurait pu être plus efficiente ?
Cela peut nourrir les pratiques de l’organisation en mettant en oeuvre le troisième secret de la Réuniologie, « faire mieux demain », c’est à dire investir du temps dans une évaluation systématique de la qualité des réunions (ROTI dans le monde de l’agile).

Gardons également en tête que ce qui fait la qualité d’un plan d’actions, c’est l’engagement pris par les personnes en charge durant la réunion. Je m’explique. En réunion, je recommande systématiquement de formuler à la fin de chaque sujet, le plan d’actions, le quoi le qui et le quand. Et si nécessaire de faire un tour de table pour vérifier qu’il convient à tout le monde. Le fait de confier à une IA la production d’un plan d’actions conduit à ne pas prendre le temps de la vérification de l’engagement en cours de réunion et il y a un vrai risque d’avoir un décalage entre le document écrit proposé par la machine et la réalité de l’engagement des personnes durant la réunion.

C’est pour cela que je recommande de mettre de l’exigence dans la formulation des plans d’action en réunion, pour améliorer la qualité de la captation et ainsi augmenter la qualité du rendu des IA.

N’oublions pas enfin l’impact de la présence d’un enregistrement sur la dynamique d’une réunion. En positif, plus d’attention. En négatif, moins de liberté de parole.
Dans tous les cas, il est indispensable d’informer clairement les participants du fait que la conversation est enregistrée et de leur transmettre l’accès à l’enregistrement après la réunion. C’est de la correction de base.

En conclusion, oui l’IA peut apporter des fonctionnalités pour la rédaction des comptes rendus, mais cela sera d’autant plus efficace que la bonne pratique des « Quoi, Qui, Quand » est déjà intégrée et ancrée dans la culture de l’organisation.

Ressources :

La Réunionite, ça suffit !

Réunioscope

Vidéo Welcome to the Jungle

Une conférence présentée par

Louis VAREILLE
Louis VAREILLE
Depuis plus de 45 ans Louis VAREILLE aime mettre de la vie dans les collectifs. Vétérinaire de formation, après plus de 30 ans de postes internationaux dans l’industrie agro alimentaire, notamment chez Danone, et 13 000 réunions animées dans 45 pays, Louis lance en 2017 l’École Internationale de Réuniologie. Depuis, il est réuniologue. Il « répare les réunions et soigne la réunionite ». Il est intervenu auprès de plus de 10 000 personnes pour empassionner dirigeants et collaborateurs et les aider à faire de chaque réunion un moment à la fois productif, engageant et apprenant. Il aime dire que la réunion est, dans toutes les organisations, la courroie de transmission de la stratégie et le creuset de la culture.

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