La parole est aux speakers : Julien Soleilhavoup

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Jusqu’à l’AFUP Day 2021, retrouvez nos interviews de speakers pour mieux comprendre leur parcours et le sujet qu’ils ou elles aborderont lors de leur conférence !

La conférence

Ethique - Data - Performances

Bon voilà, on a balancé les trois maronniers du web du moment : Ethique - Data - Performances. Il fut un temps on parlait de faible coût, de qualité et de délai en disant que l'on ne pouvait n'avoir que deux des trois. Est ce que la question se pose pour ces trois-là ? Est ce que porter une attention particulière à l'éthique et aux performances ne va pas appauvrir les données de plus en plus nombreuses à traiter ? Est ce que se concentrer sur le traitement en masse de données de manière performante peut être fait dans un cadre éthique ?

Bien sûr tout ça dépend de où vous placez votre éthique, de la quantité de données dont vous avez besoin et de quelles performances. Et surtout : avons-nous les outils pour ça et si oui : lesquels ?

Toulouse
11/06/2021
12:00-12:20

Tu as proposé tes services de mentor pour le programme de mentorat de l’AFUP, tu as partagé ton expérience du burn-out lors d’un talk au AFUP Day 2020, et tu viens nous parler d’éthique lors de cet AFUP Day 2021 à Toulouse : clairement, l’aspect humain de nos métiers t’intéresse ! Peux-tu nous en dire un peu plus sur cette dimension du job au quotidien ?

Je pense que ça pourrait presque faire l’objet d’une autre conférence tellement cette question est vaste. Devons-nous considérer les devs comme des « pisseurs de code » (pour reprendre l’élégante formulation d’un CEO de ESN) ou avons-nous quelque chose de plus dans notre métier ? Est-ce que l’industrialisation des processus de production est un frein à l’humanisation d’un métier ou au contraire permet-elle de gagner du temps pour réfléchir à ces sujets ? Je pense que le débat est ouvert depuis l’invention de l’imprimerie et mon avis est assez arrêté là-dessus : on ne produit rien de bon dans un environnement toxique et stressant. Le manifeste AGILE le dit bien (et des fois il faut revenir aux fondamentaux plus qu’aux méthodes) : les personnes avant les process. Ça implique de passer du temps à comprendre son équipe à discuter avec ses collègues, à les mettre en confiance sur leurs propres capacités, coder moins mais coder mieux, leur dire « bon aller casse toi t’en as trop fait aujourd’hui, tu y arriveras mieux demain », être bienveillant·e dans sa gestion d’équipe et de projet et surtout : appliquer à soi-même cette bienveillance.

Nous sommes en 2021 et des révélations sur des mauvaises utilisations de nos données apparaissent tous les jours, que cela vienne d’entreprises ou même de gouvernements. N’est-ce pas le bon moment pour insuffler une prise de conscience générale ?

Il n’est jamais trop tard pour bien faire, j’ai envie de dire. Les médias généralistes ont tendance à focaliser sur les réseaux sociaux et leur utilisation complètement irraisonnée des données utilisateurs ainsi que de leur stockage sans but prédéfini, mais cela fait longtemps que le web pose la problématique des utilisations frauduleuses, malveillantes et abusives des données de ses utilisateurs et utilisatrices. Vous vous rappelez l’anecdote de la base de données de Ashley Madison (un site spécialisé dans les rencontres extra conjugales), elle avait été diffusée un peu partout et ça avait un peu remué les ménages : la morale de chacun peut juger mais est-ce que c’est éthique de diffuser de telles données ? Que ce soit la recherche du profit ou un quelconque sentiment de justice ou une cause plus « noble », y a-t-il une légitimité à diffuser des données volées ou obtenues de manière frauduleuse ? D’ailleurs Wikileaks, on le situe où là dedans ? Quelle est l’éthique à appliquer dans ce contexte ? Et donc pour boucler sur ma réponse : c’est quoi « bien faire » ?

Comment peut-on identifier des entreprises exemplaires/pionnières ou tout du moins sur la bonne voie, dans leurs démarches en matière d’éthique ?

J’avoue que je n’ai pas la réponse à ça. On s’était penché dessus avec le collectif onestla.tech sans grand consensus. L’éthique est avant tout une question de respect de ses propres valeurs donc on pourrait totalement arguer que Google, Amazon, Facebook, Apple respectent leur propre éthique. Après tout, ces entreprises n’ont jamais fait aucune promesse quant au respect de la vie privée (le « don’t be evil » de Google me fait encore bien rire personnellement !). On peut souligner quand même qu’une démarche de sobriété technologique, de participation à l’écosystème libre et open source, une implication dans l’ESS ou même une structure plus horizontale (type SCOP par exemple) sont des indicateurs assez pertinents pour moi… mais c’est de mon éthique qu’il s’agit. Peut être faudrait-il définir un socle éthique commun pour les métiers du web et de la tech en général.